Eric Forbes est libraire, donc lecteur avant tout, et ça se sent ! La narration de Amqui, son premier roman, est dès le début très surprenante puisque l’intérêt n'est pas de savoir qui a commis les crimes (on le sait dès les premières pages), mais plutôt de chercher à savoir pourquoi cette personne l'a fait. Comme Forbes le dit lui-même, il s’agit là d’un « roman d’ambiance, et non d’enquête ». Et quelle ambiance ! Le récit commence avec la sortie de prison d’Étienne Chénier, par une soirée pluvieuse et glaciale. Le lecteur comprend dans ce premier chapitre que sa libération n’est que le début d’une spirale vengeresse morbide où les limites ne seront que celle de ses armes. L’enquêteur chargé de l’affaire Chénier est quand à lui un alcoolique notoire, dépressif, à la conscience professionnelle douteuse et qui n’a plus rien à perdre depuis la mort de son fils. La chasse à l’homme qui débute entre ces deux hommes sera haletante, violente, sans pitié, et mènera chacun d’entre nous à penser cette histoire au-delà du manichéisme bien/mal.

Bousculer nos schémas de pensée habituels, nous happer par un mélange de fascination et de répulsion, voilà ce que l’on demande à un bon roman noir, et c’est chose faite avec Amqui. Bravo !