Résumé : Le dernier film de Serge Giguère, Les lettres de ma mère, offre un portrait saisissant du Québec « tricoté serré » de la fin des années 40 et du début des années 50. En plongeant dans les lettres écrites par sa mère, sur une dizaine d’années, à son frère aîné parti étudier chez les Oblats, à Ottawa, le cinéaste explorait son passé familial mais nous donnait à voir et à entendre bien davantage : à travers les heurs et malheurs d’une famille d’un village ouvrier des Bois-Francs, c’est une époque à la fois proche et lointaine qu’il nous permettait de revisiter. Ce regard, empreint de tendresse, était pourtant sans concession : nulle trace, dans ce film, d’un paradis perdu. Comme il l’écrivait en marge de son scénario original : « Regarder dans le rétroviseur pour enfin y voir les vieux arbres et leurs racines qui montent dans le ciel, en somme mes aïeux, parvient à me faire sourire… Cela ne m’empêche aucunement d’avoir un œil sur la route, de me faire "collectionneur d’instants", en m’installant au volant comme un intrus dans le paysage souverain. » C’est à un voyage dans ce passé qu’invite le livre. À la transcription du film, il ajoute des lettres inédites de la mère et du frère du réalisateur, des photos du film, du tournage et d’autres tirées d’archives, ainsi que des textes de Serge Giguère, Sylvie Van Brabant, coproductrice du film, et Jean-Philippe Warren, sociologue et auteurs de plusieurs livres sur le Québec. Ces divers éléments montrent que la nostalgie, loin de toujours nous enfermer dans le passé, peut nous aider à entrevoir l’avenir autrement. C’est ce qu’ont ressenti celles et ceux qui ont vu ce film et que ne manqueront pas d’éprouver les lecteurs qui entreront dans l’univers de Serge Giguère.